La Lettre d’Archimède # 99

Le grand absent de la rentrée

Septembre achevé, faisons le point sur la rentrée cinématographique dijonnaise. Pas de grande nouveauté en cet automne 2018 au centre-ville et à Quetigny : la très vénérable Connaissance du monde migre du Cap Vert et du Devosge au Darcy, et ce dernier n’a pas repris le cycle Disney héritage qu’il proposait les mercredis, samedis et dimanches depuis quelques années. À l’Eldorado, deux nouvelles têtes sont apparues, celles sympathiques d’Orane et d’Hugo qui ont pris la suite de Manon — il n’en fallait pas moins. D’autre part, suite à nos petits galops d’essai avec Do the Right ThingThe Intruder et Anatahan, Maël et moi allons tenter de vous proposer des séances avec présentation et discussion en salle à un rythme à peu près mensuel. De son côté, Collectif Eldo monte un projet de rendez-vous périodique pour dévoiler la production « invisible » de la région Bourgogne Franche-Comté, des films sans distributeur qui n’ont en général pas accès aux salles de cinéma traditionnelles et que, dans le meilleur des cas, le spectateur ne peut découvrir qu’en festival — toutes les informations seront bientôt disponibles sur le site de l’Eldorado.

Mais, pour moi, l’événement de cette rentrée est l’absence d’Aurélio Savini. Déjà, cet été, certains spectateurs s’inquiétaient des dates des ateliers de CinéDV pour la saison 2018 – 2019. Un nouveau coup de rabot sur certaines subventions aura eu raison de cette activité qu’Aurélio a proposée et dirigée pendant douze années. Et pourrons-nous encore assister à ses Balades dans l’histoire du cinéma dans lesquels il nous montrait quelques pépites, extraits de films rares, d’entretiens télévisés ou de clichés volés dans quelque musée, qu’il savait associer intelligemment. Et la collection d’entretiens avec certains des invités des soirées de l’Eldo (à voir sur la page https://cinemaeldorado.wordpress.com/entretiens-filmes/), ne dépassera-t-elle pas le soixante-quatorzième numéro ?

Pour Aurélio, le cinéma est avant tout une pratique, des techniques, des gestes. Ses ateliers simples débutaient par une introduction théorique sur un aspect technique ou sur le travail d’un cinéaste, mais c’était le tournage d’une scène, souvent imitée d’une scène d’un film classique, qui permettaient de comprendre réellement ce que les mots recouvraient, la véritable complexité des formules. Dans les Balades, et plus encore dans les Entretiens, c’est la manière dont le film a été fait, les choix techniques et artistiques, la direction d’acteurs, plus que les opinions ou les intensions de l’auteur, qu’il mettaient en avant.

Je connais Aurélio depuis des lustres, à l’époque où nous étions tous deux étudiants et que nous fréquentions l’Eldorado que venait de reprendre Alain Cramier, redynamisé alors par la création des Amis de l’Eldo. Nous nous étions perdu de vue mais c’est sans surprise que je l’ai retrouvé lorsque je suis revenu à Dijon et retourné au cinéma de la rue Alfred de Musset. Nous avons en commun de croire que le cinéma n’est pas qu’un simple divertissement pour spectateur-consommateur. Je sais le temps pour préparer et l’énergie qu’il déployait pour cette éducation à l’image pour tous, plus que jamais nécessaire dans une époque où l’image est partout et où tous nous pouvons en produire sans effort et sans y penser. L’arrêt des ateliers, des balades et des entretiens est une vrai perte pour Dijon. Espérons qu’elle ne soit que temporaire.

Archimède

P.-S. Au moment de vous envoyer la Lettre, je reçois ce communiqué de Collectif Eldo :

« Eldorama », une séance dédiée aux cinéastes de la région Bourgogne Franche-Comté, prochainement au cinéma Eldorado.

Aujourd’hui, qui sont les cinéastes en Bourgogne Franche-Comté ? Que filment-ils ? Et comment ? Pour répondre à ces questions, Collectif Eldo s’est lancé à leur recherche, et en leur dédiant une séance spéciale. Le but est de faire connaître des films qui ne passent pas en salle, faute de distributeur. Autrement dit, de voir des films totalement inconnus ou n’ayant été diffusés qu’en festival. Nous invitons les spectateurs à venir les découvrir, à l’Eldorado (Dijon) au cours du semestre, ce cinéma vivant mais difficilement visible, et à partager un moment avec leurs auteurs ou des membres de leurs équipes. Séance à prix libre !

Si par ailleurs, vous êtes cinéastes et que vous souhaitez nous proposer vos films, alors rendez-vous à la page d’Eldorama.


Actualités

I Feel Good / par Moyocoyani

Jacques est un médiocre et un ambitieux. Prêt à tous les renoncements moraux pour échapper à la condition à laquelle ses origines modestes semblent le condamner, il se rêve PDG quand il n’est que chômeur, et échouant à trouver une « grande idée » dans le garage d’un copain (parce qu’il faut être seul dans un garage pour avoir la grande idée), va retrouver sa sœur Monique dans le village Emmaüs qu’elle « dirige ».  Il n’y cherche pas refuge, encore moins un travail, mais des âmes assez simples pour le suivre dans son projet d’un circuit tourisme-chirurgie esthétique en Roumanie. Lire la suite…

Le Pari(s) fou de Michel Ocelot (Dilili à Paris) / par Neyton Cará

Dilili à Paris

Qui est Dilili ? d’où vient-elle ? que fait elle à Paris ? Je ne vous le dirai pas ! Je m’en voudrais trop de gâter le plaisir que vous aurez à découvrir le premier plan du film de Michel Ocelot, qui répond à toutes ces questions comme on peut le faire seulement au cinéma.

Je peux toutefois vous dire que Dilili fait beaucoup penser à un autre personnage dont Michel Ocelot est le papa : Kirikou avec qui elle partage une insatiable curiosité, un sens aigu de l’observation, une grande intelligence ainsi que le plaisir de parler le français le plus soigné avec la prononciation la plus distincte qui soit. Lire la suite…


Tribune

Dernières nouvelles de l’Ouest : Les Frères Sisters / par Air C

Les Frères Sisters

Brillante distribution, film français en VO américaine, tourné en Europe, trailer percutant, Les Frères Sisters est sur les écrans. Bonne nouvelle : l’homme de l’Ouest est nouveau : son flingue lance des étincelles et puis il fait long feu.

Il y la voix de Joachim Phoenix, celle qu’on entend sur les ondes de France Inter épeler les lettres « S », « I » (aïe)… nasale à souhait, tendrement éraillée : elle nous mène un peu par le bout du nez jusqu’au ciné. D’autant que son dernier film était vraiment bien. Et puis Joachim, il trinque dans ses films*, en ce moment, des pieds, un bras… Alors on a envie de le protéger un peu ce grand garçon. Le saurait-il ? Peut-être, avec son sourire caché dans les yeux… Lire la suite…

Les Frères Sisters / par Moyocoyani

Les Frères Sisters

Il y a des années que John C. Reilly n’est qu’un second couteau apprécié dans le cinéma états-unien, le genre de visage que l’on remarque à force de voir partout, dont on apprécie toujours l’interprétation forte, jusqu’à ce que sa présence soit phagocytée par la présence de ses partenaires prestigieux. Avec Les Frères Sisters encore il y a fort à parier que le nom de Joaquin Phoenix a davantage permis de faire parler du film que le sien, alors même que c’est Reilly qui avait optionné le roman de Patrick deWitt, que c’est lui qui avait approché Audiard pour lui en proposer l’adaptation, que c’est lui encore qui a proposé que Phoenix incarne son frère. Lire la suite…

Invasion / par Moyocoyani

Invasion

Il n’est pas étonnant que Kiyoshi Kurosawa ait été attiré par la pièce de théâtre de Tomohiro Maekawa. Réalisateur passionné par l’inquiétante étrangeté, par l’intrusion dans la sphère de l’intime d’un fantastique indicible, le sujet d’extra-terrestres prenant soudain possession d’une poignée d’êtres humains, s’infiltrant parmi nous pour nous voler nos concepts sémantiques et mieux nous envahir, avait tout pour lui plaire : le caractère secret de la menace, sa dimension intellectuelle, le lent bouleversement du quotidien (notamment des personnes fréquentant ceux qui sont possédés)… Lire la suite…

Herrou contre verrous / par Air C

Libre

Libre ! ou comment faire face au déni oui-oui ? Le mot est au singulier. Il parle de cette liberté de penser au-delà des barrières de l’abrutissement qui consiste à prendre pour un fait accompli des fonctionnements illicites utilisés pour garder la main sur de petits pouvoirs. Cédric Herrou se désigne lui-même comme un paysan, simple et opiniâtre à la tâche.

Il le répète à plusieurs reprises dans le film : la liberté ne s’arrête pas aux barreaux des prisons. Rien ne lui ôtera sa liberté de mener un juste combat.

Libre, le film de Michel Toesca sur Cédric Herrou, est sorti ce mercredi 26 septembre. Lire la suite…


Chronique de tractage # 2 / Ces garçons-là

IN DEN GÄNGEN

Cet été, les tracteurs n’ont eu aucun mal à conseiller Woman at War, le film islandais de Benedikt Erlingsson. Il nous suffisait de décrire Halla, lumineuse héroïne de ce film pour que nos interlocuteurs courent (à l’Eldo) la découvrir, l’admirer et l’accompagner dans son juste et courageux combat contre les fils électriques à haute tension et pour l’adoption des petites orphelines roumaines. La tâche était plus compliquée avec d’autres personnages qui, si on les décrivait un peu trop en détail, provoquaient plutôt des moues d’indifférence, voire des grimaces de dégoût. Lire la suite…

Dijon vu par le Facteur de l’Eldo # 1 / La clinique des souvenirs

Hôtel des Allées

La première fois, en marchant dans cette allée, mon vélo à la main, je fus saisi d’une sensation étrange, une impression de déjà-vu sans pouvoir retrouver ni l’époque ni les circonstances qui avaient pu m’amener là.

L’hôtel des Allées fait partie de ma tournée, c’est le seul hôtel dans lequel je laisse des programmes de l’Eldo, il est situé dans les allées du Parc, au fond d’une cour envahie par une végétation qui ne semble pas avoir été entretenue depuis longtemps. Quant au bâtiment, je ne saurais dire de quand date sa construction ; deux étages, une façade sans ornements, une grande entrée protégée par un auvent à laquelle on accède par un large escalier. Lire la suite…

Capsule temporelle # 2 / Octobre 1908

Action Cinéma exploitation

Depuis quelques années, les films ne sont plus nécessairement vendus mais aussi loués. La société Pathé frères qui domine le marché mondial de la production a même décidé d’arrêter toute vente dès le 15 août 1907, et ses films ne sont désormais qu’exclusivement concédés régionalement. Par exemple, pour Paris et pour l’Est, donc pour Dijon, la société Cinéma exploitation choisit qui peut utiliser le matériel Pathé frères, en projeter les films et en revendiquer le nom. Cette nouvelle organisation va accélérer la sédentarisation des cinématographes qui peuvent rester de plus en plus longtemps dans une ville, en changeant de programme plusieurs fois par semaine. Lire la suite…

Film mystère # 99 (et solution du film mystère # 98)

mystery # 99

Pour jouer, reconnaissez le film mystère dont est extrait le photogramme, envoyez son titre et le nom de son réalisateur par courrier électronique à l’adresse archimede@cinema-eldorado.com ou déposez la réponse en indiquant le numéro du film mystère, votre nom et des coordonnées (de préférence une adresse électronique) dans l’urne située dans le hall de l’Eldorado. Un bulletin sera tiré au sort parmi les bonnes réponses reçues avant le vendredi 26 octobre minuit et fera gagner deux places de cinéma (à retirer à l’accueil de l’Eldorado) à son auteur. Bonne chance ! Lire la suite…

Rendez-vous à l’Eldo

Les sorties et les événements répertoriés sont ceux prévus à la date d’envoi de La Lettre. Cette liste de rendez-vous est susceptible d’être complétée, et les dates ou les horaires modifiés suite à un contretemps. Pour éviter toute mauvaise surprise, consultez toujours le site web de l’Eldorado ou son programme imprimé.

Sorties du mois

  • Les Âmes mortes (死靈魂 ; 2018) de Wang Bing. À partir du 24 octobre.
  • Bergman. Une année dans une vie (Bergman. Ett år, ett liv ; 2018) de Jane Magnusson. À partir du 3 octobre.
  • Cold War (Zimna wojna ; 2018) de Pawel Pawlikowski. À partir du 24 octobre.
  • Chris the Swiss (2018) d’Anja Kofmel. À partir du 10 octobre.
  • Dilili à Paris (2018) de Michel Ocelot. À partir du 10 octobre ; avant-première le dimanche 7 à 10 h.
  • En liberté ! (2018) de Pierre Salvadori. À partir du 31 octobre ; rencontre avec Pierre Salvadori le lundi 8 octobre à 20 h 15.
  • First Man. Le Premier Homme sur la Lune (First Man ; 2018) de Damien Chazelle. À partir du 17 octobre.
  • La Grande Aventure de Non-Non (2018) de Mathieu Auvray. À partir du 17 octobre.
  • Nos batailles (2018) de Guillaume Senez. À partir du 3 octobre.
  • Le Procès contre Mandela et les autres (The State Against Mandela & the Others ; 2018) de Nicolas Champeaux et Gilles Porte. À partir du 17 octobre.
  • Rafiki (2018) de Wanuri Kahiu. À partir du 10 octobre.
  • Le Rat scélérat, programme de trois courts métrages (2016–2018) de Ned Wenlock, Uzi Geffenblad et Jeroen Jaspaert. À partir du 10 octobre.

Événements du mois

  • Dimanche 7 (10 h) : Avant-première de Dilili à Paris. Séance gratuite pour les professeurs des écoles et de collège en classe de 6e ou de 5e ; 4 € sinon.
  • Lundi 8 (20 h 15) : Rencontre avec Pierre Salvadori — séance d’En liberté ! en avant-première, lundi 8 octobre à 20 h 15. Tarifs habituels.
  • À partir du 10 : Rétrospective Ingmar Bergman, quinze films du réalisateur. Tarifs habituels.
  • Du jeudi 18 au dimanche 21 : Czech-In Film Festival, cinq films tchèques ou slovaques. Tarifs habituels.
  • Vendredi 26 (20 h). Soirée audio-décrite. Projection de Petit paysan. Tarifs habituels.
  • Mardi 30 (20 h 15). Soirée organisée par ADF21. Projection de Sugarland suivi d’un débat. Tarifs habituels.

Contact

Vous pouvez m’écrire à archimede@cinema-eldorado.com. ou à l’adresse du cinéma si vous préférez la voie postale :

Archimède
c/o Cinéma Eldorado
21 RUE ALFRED DE MUSSET
21000 DIJON

Vous pouvez accéder aux précédentes Lettres sur le site de l’Eldorado : https://cinemaeldorado.wordpress.com/la-lettre/.

Pour recevoir la Lettre par courrier électronique, communiquez votre adresse mail à l’Eldorado (une boîte aux lettres est prévue à cet effet à l’accueil) ou à l’adresse archimede@cinema-eldorado.com.

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